Zu Xiong, experte en batik Hmong

10 juin 2013

À Luang Prabang, j’ai passé la journée avec Zu Xiong, véritable experte dans la technique du batik, qui dispense et pratique son savoir dans les ateliers d’Ock Pop Tok.

Originaire d’un village à 50 kilomètres de l’ancienne cité royale, Zu Xiong appartient à l’ethnie des Hmongs. Elle a grandi à la campagne et a été initiée à ce savoir-faire textile ancestral dès l’âge de douze ans. Avec son beau costume traditionnel : coiffe ronde et graphique, veste indigo brodée, décorée de jeux de galons sur l’encolure et les emmanchures, ceinture rose vif aux motifs sinueux, ce petit bout de femme arbore dignement les signes de son groupe ethnique.

Assise calmement à une table, elle me fait une démonstration de dessin selon la technique du batik. Sur un rouleau de chanvre naturel et rustique, Zu Xiong dessine patiemment avec un stylet en bambou et métal et de l’encre noire, mélange de cire d’abeille et de pigment indigo. Elle recouvre progressivement toute la surface du tissu, en commençant par les bords et de façon symétrique. Ce sont ses motifs qui vont donner à la pièce toute sa structure et son caractère. À 59 ans, Zu Xiong connaît son répertoire par cœur. Ses dessins stylisés représentent des animaux comme un escargot, des plantes et feuillages, des graines de concombre ou de courge… Tout l’univers rural du quotidien des Hmongs symbolisé en quelques traits. La cire va s’incruster dans les fibres du tissu pour empêcher que la teinture ne prenne dessus.

Nous n’en sommes qu’à la première étape de la réalisation d’un batik. C’est un long processus que Zu Xiong me détaille. Pour préparer le pigment qui donnera sa couleur à l’étoffe de chanvre, il faut mettre les feuilles de l’indigotier dans une jarre pendant quatre jours. On retire ensuite la matière végétale et on y laisse les pigments fermenter pendant sept jours supplémentaires avant d’y tremper à froid le tissu avec les motifs à la cire, avant de le faire sécher au soleil. Pour obtenir ce bleu intense qui tire jusqu’à un noir profond, il faut répéter l’opération de trempage et de teinture trois à quatre fois par jour minimum, et dans l’idéal jusqu’à quarante fois pendant un mois.

Enfin, on fait bouillir le tissu pour faire fondre la cire et pour qu’apparaissent enfin les dessins en réserve en blanc. Le batik est enfin terminé. Cette pièce est la base de toutes les créations textiles des femmes Hmongs. Elles les rebrodent de galons rouges appliqués ou de points géométriques, assemblent plusieurs étoffes pour créer des tentures ou de grandes jupes plissées, comme celle que porte Zu Xiong le jour de notre rencontre.


LUANG PRABANG, LAOS