Les tisserandes de Phrae Wa

16 février 2014

Rouge est la couleur.

Bien loin des plages envahies de touristes et de la folie de Bangkok, je suis partie dans le Nord-Est de la Thaïlande, dans la région rurale d’Isan qui borde le Laos et le Cambodge. C’est plus précisément dans la province de Kalasin qu’on peut trouver une soierie unique appelée Phrae Wa.

Cette étoffe est si rare que sa Majesté la Reine Sirikit a souhaité en soutenir la production et la promotion, jusqu’à en assurer une reconnaissance sur le plan local et international. Un festival annuel de la soie Phrae Wa à Kalasin rend d’ailleurs hommage à son engagement et propose, une semaine durant, des défilés de mode, des concours de la plus belle pièce et des démonstration de tissage.

Le Phrae Wa est un style de tissu artisanal unique, réalisé spécifiquement par les femmes de la communauté des Phu Tai qui vivent dans cette partie de la Thaïlande. Elles portent leurs productions de différentes façons: en étole, mais aussi en sarong, en ceinture et les utilisent aussi pour parer les cols et les manches de leurs paletots sombres. Les jupes portefeuille sont tissées selon la technique de l’ikat et agrémentée d’une bordure rayée. Le châle traditionnel quant à lui, appelé « Pha Phrae Wa », est composé d’une partie principale en brocard, le « Lai Lak », et d’un parement en rayure : le « Lai Thaep ». Il est porté de façon asymétrique, drapé sur une épaule, et noué au dos.

Les fils de soie sont teints selon des procédés naturels et la couleur de fond traditionnellement rouge est obtenue grâce à la laque, une résine sécrétée par des insectes, les cochenilles asiatiques.

La technique de jacquard manuel permet d’insérer des fils de trames supplémentaires et donne du relief au tissu, permettant de créer des motifs qui viennent contraster avec le fond de toile rouge. Sur un bout d’étoffe, on peut retrouver jusqu’à une dizaine de motifs différents qui retranscrivent des symboles et des croyances de la communauté Phu Tai. Par exemple, le motif du serpent, appelé « lai nak » représente les ancêtres. Les femmes de l’ethnie Phu Tai continuent de porter leur habit traditionnel lors de cérémonies rituelles et pour assister à des festivités locales, comme pour le Bun Bang Fai, la fête des Fusées qui a lieu au début de la saison des pluies, mais aussi pour des mariages ou des rites de guérison.

Avec la reconnaissance du caractère unique du Phrae Wa, les tisserandes Phu Tai préservent ainsi leur culture textile ancestrale qui fait la fierté et l’emblème de leur communauté. Elles vendent maintenant leurs créations dans tout le pays, développant ainsi des tissages dans des coloris moins typiques, allant du violet jusqu’au beige. Elles s’assurent ainsi des revenus meilleurs, dans une des régions les plus pauvres de la Thaïlande.

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KALASIN, THAILANDE

Splendide Musée des Textiles de la Reine Sirikit

10 décembre 2013

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Il y a à peine un mois je vous parlais du formidable Symposium organisé à Bangkok qui rassemblait une foule d’experts pour échanger sur la thématique des textiles royaux de la cour de Thaïlande. Il est temps maintenant de vous présenter le Musée des Texiles de la Reine Sirikit, qui nous a également été présenté durant ces journées dans la capitale thaïlandaise.

Ouvert en 2012, le musée est situé dans l’ancien bâtiment du Ministère des Finances complètement réhabilité pour l’occasion, à deux pas du Palais Royal.

Il abrite les somptueux costumes et habits d’apparat de la Reine, de remarquables collections textiles de Thaïlande et de l’Asie du Sud-Est. Le musée entend se positionner comme un centre de recherche pour tous les passionnés de textile et propose aussi des expositions temporaires qui mettent en valeur les fonds de collection.

J’ai été frappée par le raffinement des tenues de la Reine Sirikit, toutes brodées de perles, de carapaces de scarabée et taillés dans des brocards de soie spectaculaires. Il faut que ça brille! Sa Majesté est également une reine du style, avec un vrai sens de la mode. On découvre notamment sa collaboration de longue date avec Pierre Balmain et comment elle a créé l’habit national féminin dans les années 60 : une tunique de soie savamment drapée, d’une élégance folle.

Magali An

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À gauche, la conservatrice en chef Julia Brennan nous présente le laboratoire de conservation. Ce département occupe une place essentielle dans la préservation des fonds du musée.

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Détail de l’habit national de Thaïlande

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À gauche, paletot de soie brodé de fils d’or et de carapaces de scarabées, élevés spécialement pour cet usage.

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Exemples des tenues de sa Majesté la Reine Sirikit, issues de sa collection personnelle.